Le métal jaune vient de franchir un cap historique en dépassant les 3 900 dollars l’once début octobre 2025. Cette progression spectaculaire confirme la position de l’or comme refuge privilégié des investisseurs face à un environnement international particulièrement troublé. Depuis janvier, la hausse dépasse 49%, alimentée par une conjonction inédite de facteurs politiques et économiques.
La paralysie budgétaire américaine, effective depuis le 1er octobre, contribue largement à cette envolée. Environ 750 000 fonctionnaires fédéraux se retrouvent au chômage technique tandis que les services publics non essentiels cessent leurs activités. Cette situation, la première depuis 2018, ravive les incertitudes sur la première économie mondiale. Les marchés observent avec nervosité l’impasse politique entre républicains et démocrates au Congrès, sans issue apparente. Chaque semaine de blocage pourrait amputer la croissance annuelle du PIB américain de 0,2 point.
Un chaos politique qui se propage en France
À des milliers de kilomètres, la France traverse également une zone de turbulence politique sans précédent. Le gouvernement de Sébastien Lecornu a volé en éclats après seulement quatorze heures d’existence, un record absolu sous la Cinquième République. Nommé Premier ministre le 9 septembre, Lecornu a remis sa démission le 6 octobre au matin, quelques heures après l’annonce de sa composition ministérielle. Le retour controversé de Bruno Le Maire comme ministre des Armées a déclenché une fronde au sein des Républicains, précipitant l’effondrement de l’exécutif.
Cette instabilité française, conjuguée au blocage américain, alimente la défiance envers les monnaies traditionnelles. Les investisseurs se tournent massivement vers des actifs tangibles, perçus comme plus sûrs dans un climat d’incertitude généralisée. Les stratèges financiers soulignent que le métal précieux n’attire plus seulement pour se protéger de l’inflation, mais aussi pour se prémunir contre l’imprévisibilité des gouvernements.
Les banques centrales, acheteuses compulsives
L’appétit des institutions financières publiques pour l’or constitue l’autre moteur majeur de cette flambée. Les banques centrales accumulent désormais 1 000 tonnes annuellement depuis trois ans, soit le double des achats observés il y a dix ans. La Pologne se distingue particulièrement avec près de 50 tonnes acquises au premier trimestre 2025, dépassant les achats chinois de l’année précédente. Le Kazakhstan, la Turquie et la Chine maintiennent également une politique d’acquisition soutenue.
Cette ruée s’explique par la volonté de diversifier les réserves nationales et de réduire la dépendance au dollar. Les analystes prévoient que ce mouvement se poursuivra durant trois à six ans, les institutions cherchant à atteindre leurs objectifs de diversification. Selon une enquête du World Gold Council auprès de 73 banques centrales, 92% anticipent une augmentation globale des réserves d’or dans les douze prochains mois, et 43% prévoient d’accroître leurs propres stocks.
Les perspectives restent résolument haussières. Goldman Sachs table sur 4 000 dollars l’once d’ici mi-2026, avec un scénario extrême pouvant atteindre 5 000 dollars en cas de transfert massif des investisseurs privés vers l’or. HSBC anticipe quant à elle une moyenne de 3 215 dollars en 2025. Ces projections reposent sur la continuation des achats institutionnels et l’afflux croissant vers les fonds négociés en bourse adossés à l’or. La demande des ETF exerce d’ailleurs une influence 50% plus forte sur les prix qu’au cours de la période 2021-2024.
L’argent et les autres métaux précieux évoluent différemment. Le cours de l’argent stagne autour de 48 dollars l’once, tandis que le platine progresse modérément à 1 613 dollars. Le palladium suit une trajectoire similaire. Les analystes estiment que l’or devrait surperformer l’argent dans les mois à venir, ce dernier subissant la pression d’une demande industrielle en baisse, notamment dans le secteur photovoltaïque chinois.